Dorothée Munyaneza – Samedi Détente (Théâtre Jacques Prévert – Aulnay)

/ Arts Vivants

Évènement passé

Mêlant théâtre, danse et musique, Samedi détente est la nouvelle pièce de la chorégraphe d’origine rwandaise Dorothée Munyaneza. Samedi détente parle de ces instants de paix avant la guerre, de ces instants de vie avant la mort, de ces instants de rire avant les larmes, de la mémoire avec laquelle on vit, parfois même heureux, mais dont le souvenir demeure et parfois refait surface à l’écoute d’une chanson ou à l’évocation d’un nom de celui ou celle qui n’est plus. 

Au Théâtre Jacques Prévert à Aulnay-sous-Bois le 10 janvier, puis au Monfort du 15 au 31 janvier

Accompagnée d’Alain Mahé et de Nadia Beugré, Dorothée Munyaneza revient sur sa propre expérience et pose son regard sur l’Histoire, vingt ans après le génocide rwandais. Intitulé Samedi détente, en référence à une émission de radio rwandaise qui a bercé son enfance, sa création se veut un témoignage avec la distance qui sied à l’artiste quand il agit sur la réalité pour la sublimer et faire œuvre de création. Dans cette tentative pour dire l’indicible, l’humour a sa place, les vivants y côtoient les morts, le rire les larmes, la comédie le drame.

« Comment raconter l’indicible ?

Comment parler du départ d’un lieu qu’on a aimé ? Des circonstances durant lesquelles on a dû quitter le nid de l’enfance, un jour, en cachette, sur les routes parsemées de corps, de sang et de silence ? Comment raconter la chaleur d’un corps sous un tas de couches d’habits, « mugondo », qu’on ne pouvait transporter dans des valises car elles auraient été trop lourdes et encombrantes lors de l’exode ? Comment raconter les journées de marche, de soif et de faim ? Comment raconter les poux, le sommeil sur une bâche au milieu de la forêt ou le réveil sous une pluie torrentielle au milieu de la nuit en pleine campagne ? Comment raconter la fuite au clair de lune dans les champs de café ? Comment raconter les rires ? Comment raconter les chansons ? Comment raconter les psaumes et les danses ? Comment raconter le miel si doux et si rare quand la viande se vendait pour quelques centimes et la chair pourrissait sous les mille collines ? Comment raconter des mois passés sans voir sa mère ? Comment raconter à ceux qui se trouvaient là-bas, loin de nous, où les informations parlaient de manière superficielle du génocide qui disséminait le Rwanda tout entier ?

On a tellement peu parlé de ce génocide. et quand on en parlait on en parlait mal.
Je voudrais mettre un accent artistique sur un sujet historique dont il reste encore beaucoup à dire.

Voici 19 ans qui ont passé, 19 ans que j’ai vécu loin de mon pays, 19 ans que j’ai eu le temps de reprendre goût à la vie, de grandir, de réfléchir, et enfin, de pouvoir écrire.

Je suis retournée à plusieurs reprises au Rwanda, j’ai pu voir les membres de ma famille qui sont encore vivants. J’ai pu vivre le vide laissé par ceux qui sont morts. J’ai pu entendre des témoignages de mes proches ou de ceux à qui l’on prête une oreille attentive. Je les ai enregistrés. J’ai pu voir les cicatrices laissées par des machettes, et celles des blessures qu’on ne voit pas à l’œil nu mais que l’on reconnait quand on rencontre celui ou celle qui a vécu ce que l’on a vécu soi-même.

Je veux parler au travers des yeux qui ont vu. Je veux partager la parole de ceux qui y étaient. et je l’appellerai Samedi Détente. »


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