Trois Fois Rien au Centre Calouste Gulbenkian

/ Cinéma

Évènement passé

A partir du samedi 24 novembre, le Centre Calouste Gulbenkian ouvre ses portes et ses écrans à trois artistes. « Trois Fois Rien » invite à découvrir des artistes et des œuvres qui font cohabiter un, deux, voire trois médiums comme autant de façons de montrer et de dissimuler. Ruralité, aspérité, intimité. Puis, lenteur, simplicité et écoute. Tels sont les sens communs aux trois univers artistiques de Zoé Chantre, Aya Koretzky et Eléonore Saintagnan réunis dans le premier volet de la série de trois expositions « Trois Fois Rien ».

On a beau chercher, on ne trouve pas. Il n’y a manifestement rien à attendre des œuvres de Zoé Chantre (1981, Tulle), Aya Koretzky (1983, Tokyo) et Eléonore Saintagnan (1979, Paris) ; elles ne résolvent aucun mystère, ne répondent à aucune question. La démarche de ces trois artistes consiste plutôt à aller à la rencontre de gens proches ou lointains, par le biais d’une approche fondée sur la gratuité et l’humilité, une approche faite d’écoute et d’attention délicate. Cette manière lente et sans attente de poser le regard révèle une honnêteté derrière laquelle on devine un souci d’égalité et de complicité avec les objets et les sujets présentés. Dans leurs œuvres, pas d’accidents, de sursauts, d’imprévisibilité. Pas de glorification d’une « mise-en-personnage » vidant de leur individualité celles et ceux qui se prêtent au regard des artistes. Les corps, visages, gestes et paysages sont ordinaires et livrés comme tels : dans leur répétition mais aussi dans leur quotidienneté changeante et inapprivoisable. Quotidienneté dévoilée comme un territoire dans lequel la répétition des gestes, des postures, des paroles et des saisons ne mène au final à rien.

Premier volet de « Trois fois rien » donc, avec deux films d’Aya Koretzky : un long-métrage, Yama no Anata (Au-delà des montagnes) de 2011, dans lequel se déploient les paysages longeant le fleuve Mondego au centre du Portugal, où Aya et ses parents sont venus s’installer en 1992 après avoir quitté Tokyo. Ces mêmes paysages servent de toile de fond au court-métrage Terror Japonês (Histoires de fantômes japonaises), coréalisé avec Miguel Clara Vasconcelos en 2006. Des proches de l’artiste racontent devant la caméra de vraies-fausses histoires d’épouvante.

Tiens moi droite de Zoé Chantre (2011) est un film-récit à la première personne où se mêlent contraintes et aubaines liées à la découverte et au traitement d’une scoliose chez l’artiste. Le livre Projections privées (carnet de route) écrit en tandem avec Alexandra Pianelli (2008) et les cinq photographies lenticulaires éclairées – Photos de familles – sont issus du même projet intitulé Projections privées. Réalisé entre 2006 et 2008, il consistait à se rendre chez les habitants de différents villages du canton d’Auberive en Haute-Marne et à y programmer des séances de cinéma. À chaque session, deux photos de la même famille furent prises, donnant lieu par la suite à la création d’une seule photo lenticulaire. Coérigé avec Alexandra Pianelli, Confidences de boutons (2006) est un recueil d’histoires de boutons de vêtements.

Le Parc naturel régional des Ballons des Vosges est le cadre d’Un film abécédaire d’Eléonore Saintagnan (2010) dans lequel des villageois sont les personnages d’une histoire filmée qui est la leur. On y croise encore des dieux Vikings, ceux du rock’n’roll, saint Nicolas et frère Joseph. Dans Les Malchanceux (2012), c’est le jeu de quilles, et plus particulièrement la reconstitution d’un tournoi sur un ancien quillier désaffecté, qui permet d’entrevoir la vie des habitants de la campagne du Pas-de-Calais, région fortement touchée par la désertification. Du Pas-de-Calais à l’Ardèche avec le court-métrage Les Petites Personnes (2003), mettant en lumière le quotidien villageois de trois sœurs en bas âge qui, entre jeux d’enfants et responsabilités d’adultes, inventent un monde bien à elles.

António Contador (Commissaire)


Pays :


Continent(s) :