Kanaks (Galerie Hélène Bailly)

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À l’occasion du Festival Photo Saint-Germain-des-Prés, la galerie Hélène Bailly met à l’honneur la nouvelle série du photographe Denis Rouvre: Kanaks.

Denis Rouvre a passé trois semaines en Nouvelle Calédonie. Lors de son immersion il a pu photographier treize tribus de chasseurs, de pêcheurs ou de guerriers…

Une nouvelle fois le photographe a su laisser s’exprimer la beauté de ces visages si proches et en même temps si loin de nous tant par leurs regards que par leurs attitudes.

Ces tirages ont le pouvoir d’exprimer la force de ce peuple et nous transmettent une indescriptible émotion.

L’art de la guerre commence avec l’affirmation d’un regard. Résister, c’est ne pas baisser les yeux. Depuis l’autre bout du monde, depuis l’autre bout de la France, depuis la commune de Canala, à trente kilomètres au nord de Nouméa, Toawani Tonchane, Basile Kaitchou, Toawani Moasadi, Franck Tomedi, Ezekia Diake nous regardent dans les yeux. Ils se présentent face à l’objectif du photographe. Ils se présentent face à nous. On ne voit pas leurs corps mais on les devine fichés en terre, ancrés dans un sol dont jamais on ne pourra les déraciner. Ils sont fils et filles de la terre kanak. Ils sont de la tribu des irréductibles, de Gelima, de Nonhoué, de Nakety, de Neho… Leurs visages ont les couleurs de l’argile séché et du bois. Leurs cheveux sont de broussailles. Ce sont des hommes et des femmes paysages. La lumière du photographe accuse les reliefs et les aspérités de leurs gueule rudes de pécheurs, d’agriculteurs, de soutiers de la mine. Elle épouse le grain et les sillons de la peau. Elle prend acte du voltage intense des pupilles. Il y a de l’arrogance dans ces prunelles chargées au noir. Des braises de tristesse aussi. Une larme d’amertume. Le noir de la violence et des exploits indépendantistes est passé, mais ces regards portent encore le flambeau d’une inflexible insularité. Ces hommes et ces femmes sont les fils et les filles d’un monde révolu qu’ils s’acharnent à faire perdurer. lIs vivent à cheval entre le passé et le présent, chevaliers d’un monde coutumier qui les a vus naître, et qui, avant eux, a vu naître leurs aînés, leurs ancêtres, leur dieux familiers. Ils s’accrochent à la tradition sans être assurés de pouvoir toujours la préserver. La brutalité de leurs traits corrobore la brutalité de la vie et de l’histoire. Les vieux sont fracassés. Les jeunes sont revendicatifs. Les valeurs des uns ne coïncident plus forcément avec celles des autres. Ils sont de Canala et d’outremer. Ils sont rebelles et vaincus. Héros et renégats. Solidaires et claniques. Enracinés et sans repères. Ils nous regardent depuis les lointains. Nous les voyons pour la première fois.


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