Carnet de Charbon (Gabriela Lupu)
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Évènement passé
L’Institut culturel roumain, dans sa galerie Rue de l’Exposition, expose le reportage de la photographe Gabriela Lupu sur les mines de charbon de la région de Valea Jiului, en Roumanie.
Gabriela Lupu a fouillé les mines de l’ouest de la Roumanie pour dénicher des instants de la vie des hommes qui creusent pour ramener à la surface les trésors de la terre. Ce n’est pas une vie facile, mais les mineurs ont toujours le sourire aux lèvres. Les mines, l’un des secteurs industriels les plus importants à l’époque communiste en Roumanie, ont mal supporté la transition vers le libre marché. La majorité d’entre elles ont été fermées. Celles qui fonctionnent encore s’appuient sur de vieilles technologies, ce qui n’améliore pas la vie des mineurs.
Elle explique: « Je suis allée à la mine de Vulcan pour la première fois en 2005. Je me demande toujours comment j’ai atterri là, qu’est ce qui m’a poussé à aller à Valea Jiului ? Je ne connaissais personne à Valea Jiului, je n’avais jamais vu un mineur de charbon ; quand les mineurs sont descendus dans la rue à Bucarest en 1992, je n’avais pas la télévision ; mon père n’était pas mineur de charbon, je n’ai jamais vécu dans une région minière. Quelque chose m’a poussé à aller à Valea Jiului.
Bercée par le bruit du train avec des sièges en similicuir marron et froid, un monsieur avec un chapeau en fourrure me réveille «Mademoiselle, vous êtes arrivée à Vulcan ! » Il savait que je vais descendre là, car il m’avait interrogée dès que je me suis assise en face de lui. J’arrive au centre ville. Je vois des barres d’immeubles gris et des gens dans la rue. Et maintenant, elle est où la mine ? me demandais-je. Je débutais en photo. J’étais naïve.
Je demande aux passants ou se trouve la mine ; ils me disent qu’elle est en dehors de la ville, qu’il faut prendre un bus. Je n’ose pas demander plus. Je ne sais pas quoi faire, j’attends. La chance fait que je vois un groupe d’hommes qui montent dans un bus. Je me rends compte que ce sont des mineurs. Je demande un ticket pour la mine, mais on ne paye pas de ticket pour aller à la mine ; personne ne va là bas pour regarder ; les mineurs ne payent pas le transport jusqu’à leur lieu de travail. Je suis à moitié assise sur ma chaise, je n’ose pas trop regarder les visages, je me sens dévisagée, je ne parle à personne. C’est ainsi que commence mon premier contact avec les mineurs de charbon et la région de Valea Jiului.
J’arrive finalement à la mine de Vulcan. Tout paraît en ruine. Tout a la même couleur rouille. Même le ciel. Dans la cour de la mine il y a des chiens qui n’appartiennent à personne. J’ai peur. Je rencontre le directeur de la mine, monsieur Surulescu. Un homme gentil qui aime la mine.
Il m’explique comment la mine est organisée et me donne des détails par rapport aux licenciements. Il demande à quelqu’un de m’accompagner pendant que je photographie. Ça fait un peu visite guidée. Mais je suis impressionnée par tout, tout attire mon regard, la situation me dépasse. Je photographie, je ne comprends pas tout ce que je fais. Je vois des groupes de mineurs bavarder, des mineurs attendant de descendre dans la mine, des mineurs sortant de la mine. Je visite la cantine, les vestiaires, les douches vides, la salle de pointage. Mais je ne comprends toujours pas comment ça marche.
Après deux jours de prises de vue je retourne en France. Je me suis retrouvée avec quelques belles photos, exotiques pour le coup, mais je n’avais rien compris.
J’effectue plusieurs voyages entre 2005 et 2010. Toujours de courte durée, pas plus de 10 jours. Mais je suis toujours accompagnée par quelqu’un quand je prends des photos. On me fait faire toujours le même trajet: cantine, vestiaires, lampisterie, salle de pointage, cage de descente. On finit le tour par les douches et les alentours de la mine. J’essaie à chaque fois de prendre le temps de regarder, de parler, d’écouter.
Dans mon dernier voyage je descends au fond de la mine. C’ést un privilège pour moi. Je n’ai pas peur car je suis persuadée qu’on ne va pas m’emmener dans des endroits dangereux. Il a fallu faire contrôler l’appareil, signer des papiers et s’habiller en mineur avant de descendre au fond. Je suis ravie de vivre une telle expérience.
Je suis bien sur accompagnée. Par un ingénieur qui inspire confiance et aime parler de ses enfants. Ça y est, je suis dans la cage. Il y a plusieurs mineurs. Il n’y a plus de lumière, ça sent l’humidité, ça descend vite. Je ne pense à rien. La cage bouge, ça n’a pas l’air sécurisé. De l’eau coule d’en haut. Je vois les murs défiler devant mes yeux, car parfois il y a de la lumière.
Au fond de la mine les gens sont presque solennels. Je sens le silence, le vent, l’humidité, la fragilité de la vie, le regard des visages noirs. Parfois j’oublie de photographier. Il y a des courants d’air dans certaines galeries. Il fait noir. Je ne peux pas photographier….
Valea Jiului est située à l’ouest de Roumanie, dans le massif des Carpates et regroupe six villes minières : Petrila, Aninoasa, Lupeni, Uricani, Vulcan et Petrosani. Les photos ont été prises à Vulcan et à Petrosani avec sa mine de Livezeni.
L’histoire de l’exploitation minière dans la Valée commence en 1840, connaît une période de gloire sous Ceausescu, pour arriver à la fermeture successive des mines à partir de 1999 jusqu’à présent.
C’est une histoire fort connue en Europe, celle des villes minières. Les mines sont devenues non rentables. La population d’une région entière est au chômage.
Pour la réorientation professionnelle la région mise sur le tourisme, mais la région manque toujours d’infrastructure. »
En 2012 la galerie Rue de l’Exposition présente sous le thème « Réminiscences » des séries photographiques inspirées par les dernières traces d’un monde en voie de disparition.
Pays :
RoumanieContinent(s) :
EuropeInfos Pratiques
:Institut Culturel Roumain
Horaires
- Lundi : 10h-13h / 14h-18h
- Mardi : 10h-13h / 14h-18h
- Mercredi : 10h-13h / 14h-18h
- Jeudi : 10h-13h / 14h-18h
- Vendredi : 10h-13h / 14h-18h
- Samedi: fermé
- Dimanche: fermé
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Adresse
1 Rue de l'Exposition
75007 Paris

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- 69, 80, 82, 87, 92

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